dimanche 1 juillet 2007

Second Life: Souvenirs secondlifiens


Area 51, 14 février 2007- Archives personnelles-

Je suis allé voir Hatzfeld Runo. Il fait partie des premiers avatars que j'ai connus au début de ma vie sur Second Life. Nous ne nous connaissons pas très bien mais sur Second Life, tout est plus rapide. Il suffit de passer une soirée avec un avatar pour qu'il fasse partie de votre liste d'amis et de votre paysage mental. Hatzfeld a de plus la particularité d'être quasi-systématiquement online quand j'y suis. Depuis quelque temps, il m'envoyait régulièrement des "notes card" sur la boutique de tatouages,Tiki Lounge et Tikki Tattoo qu'il a récemment créée.


Sa boutique est en fait un bout de plage très cool sur une île. Cela m'a agréablement surpris. Musique reggae, palmiers, bruits de vagues. On est tout de suite dans l'ambiance.

Finalement il y a une continuité dans les êtres. Quand je l'ai connu il passait son temps avec ses potes sur un autre "bout de plage" à Area 51.

Maintenant c'est lui qui a créé l'endroit de ses rêves. C'est un des effets de Second Life. Si on y reste, on finit par faire des choses que l'on aime et qui nous ressemblent.


J'ai quelques souvenirs avec Hatzfeld: il m'avait invité une fois dans une folle soirée où nous nous étions au moins 6 ou 8 avatars à danser de façon totalement synchronisée sur une plage adulte.


J'avais quelques problèmes de cheveux à l'époque. J'en ai toujours. Mais passons sur ce sujet sensible.

Hatzfeld était l'initiateur de cette soirée, le boute-en train qu'on est content d'avoir près de soi, quand on veut s'amuser.

Hatezfeld est derrière moi, avec mes cheveux intermittents.

Je me souviens aussi d'une discussion avec lui qui m'avait beaucoup éclairé. Il me disait que sa vie sur Second Life avait beaucoup changé. Il voyait beaucoup moins de monde qu'au début et surtout il s'était lancé dans la construction.
Je commençais moi-même à échafauder l'hypothèse qu'une vie à long terme sur Second Life ne peut se limiter à juste " du fun". Chez la plupart des avatars qui y restent, le besoin d'y faire quelque chose de "concret" se fait sentir. Trouver un boulot, construire, créer.


Ce soir-là quand j'ai débarqué sur son île, Hatzfeld était avec une amie à lui, Angelica, qui a l'air de bien le connaître. Hatzfeld m'avoue qu'il a rarement autant ri qu'avec cette avatar. Nous parlons du passé. Ils évoquent des souvenirs en commun, au ski, et puis un saut en parachute particulièrement hilarant. De grands moments vécus ensemble. Une vraie complicité d'avatars.

Angelica: J'avais les cheveux longs à l'époque, tu te souviens?
Apparemment Hatzfeld avait lui aussi un souvenir précis de cette époque.


Tout cela m'a beaucoup troublé. Bon il est vrai que je suis particulièrement sensible aux cheveux et entendre Angelica relier un souvenir de vie sur Second Life à un souvenir capillaire m'a fait quelque chose. Mais ici il s'agit d'autre chose. Angelica évoquait devant moi un vrai "souvenir secondLifien".
Le souvenir secondLifien est émotionnellement très fort, particulièrement marquant et n'a rien à voir avec d'un souvenir de notre vie "matérielle". Il nous poursuit souvent, le lendemain d'une connexion particulièrement riche. Il imbibe notre quotidien, l'éclaire parfois. Il persiste de façon puissante dans notre esprit, un peu comme une persistance rétinienne. Le lendemain d'une belle soirée passée sur SL, nous sommes comme dans une sorte de nuage enveloppant.

Les souvenirs secondLifiens ressemblent à des rêves. On pourrait les qualifier de "souvenirs-rêves". Le vécu virtuel ressemble par certains aspects à notre vécu "onirique".


Lorsque nous rêvons, notre corps est au repos. Cela permet à l'esprit de se libérer. Comme dans le virtuel. Notre cerveau n'a plus à mobiliser cette énergie pour esquiver un danger corporel, ou pour tout simplement marcher droit dans la rue. Le corps ne risque rien. Il est désactivé. L'esprit peut alors se concentrer sur sa propre vie. Il peut "vivre" sa vie. S'exprimer librement.

Hatzfeld laisse ici son esprit s'exprimer.(Avec l'accord D'Aniah)

Dans le virtuel, cette économie du corps permet à l'esprit d'être largement plus disponible, plus réceptif et plus libre. Cela donne un relief particulier à notre vécu. Il suffit d'écouter ceux qui y vivent des histoires d'amour. Elles ont une intensité particulière. Pas seulement due au fait de fantasmer sur ce que l'autre pourrait être. Mais surtout parce que la tête marche à 100% dans ce monde, débarrassée des contraintes du corps.

Malgré les apparences, c'est ici l'esprit qui agit et non pas la main d'Hatzfeld.

Le vécu virtuel est sans aucun doute un vécu plus spirituel. La mise en sommeil du corps et la grande implication de notre esprit dans le virtuel est une richesse que nous avons commencée à expérimenter. Il s'y passe nécessairement autre chose entre les êtres. Cette possibilité nouvelle peut être une source merveilleuse de rapprochement entre les êtres. Comme elle peut aussi tourner au drame et au rejet de l'autre. Comme toujours, nous avons le choix. Construire ou détruire.
J'ai laissé Hatzfeld car il était tard et il devait continuer sa propre "construction".



Les souvenirs Secondlifiens ne seraient-ils pas comme des tatouages?





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dimanche 24 juin 2007

Second Life: Don't Worry be Happy



La soirée avait plutôt mal commencé. Une amie bien intentionnée m’avait invité dans une boîte de nuit. Le but était de danser sur une vache. Bon. Chacun son trip après tout.

Inutile de dire que je n'étais pas dans le "mood". D'ailleurs, ce n'était pas de la faute de cette pauvre vache, ni de cette soirée. Cela faisait un certain temps que je n'étais pas "dedans". Je n'arrivais plus à apprécier Second Life à sa juste valeur. La veille par exemple, j'étais avec Loulou à Cocololo Island un lieu de rêve.

Loulou: Oh je suis sur un éléphant! Je ne m'en étais pas rendu compte! C'est génial! J'ai atterri sur un éléphant!
Moi: Euh... oui, c'est un éléphant!

Je ne pouvais pas partager sa joie. Je n'avais strictement rien à dire. Vide.

Loulou : Oh un chemin, génial, j’adore.
Moi : Ouais...
Loulou: J'adore! On doit suivre les flèches!
Moi: Ah oui, c'est sympa les flèches!

Aucun répondant. Aucune impression. Un automate.

Loulou: Oh un tigre! Génial! Il rugit. Vas-y monte, et il va rugir!
Moi: ça ne marche pas. A mon avis, Il ne rugit qu'avec les femmes.

Je commençais à dire vraiment n'importe quoi. Très mauvais signe. Je ne savais plus quoi inventer pour me sortir de cet état. Aucun de ces "petits rien" que j'affectionne tant et que Loulou me donnait sans s'en rendre compte ne me faisaient d'effet. Une nouvelle perte de foi. Après cela, il y a eu la ballade en bateau.

Nous nous sommes noyés une bonne dizaine de fois avant de réussir à nous installer dessus. Loulou a beaucoup ri. Pas moi. C'était plus fort que moi.

Loulou: Tu me montres quoi avec ta main ?
Moi: Je te montre cet endroit merveilleux...

Je commençais à remonter la pente. Très légèrement.( Je remercie au passage, le créateur de cette animation qui m'a fait lever la main.)


Loulou: On vole ?
Moi: Eh oui! C'est Second life, un monde magique!
Loulou: C’est le rêve !
Moi: Oui, un rêve à deux...

Je reprenais vie. Progressivement. Ouf.


Loulou:T’entends la musique ? Je trouve ça fou… .c’est presque mieux que la balançoire…

Pour une fille qui a une "Swing Quest" c'était vraiment une déclaration d'amour à la vie.
La chanson qui passait était "Don't worry, be happy". Une sorte de message subliminal adressé à mon cerveau. Ne pas s'en faire et être heureux. Tellement vrai. Tellement juste. J'essayais de me le répéter.


Malgré l'enthousiasme de Loulou et cette chanson merveilleuse, et je restais émotionnellement bloqué. Constipé. Il fallait que je fasse quelque chose. Mais quoi? En tout cas il y avait urgence. Il fallait que je retrouve mon sourire intérieur.


Le lendemain, après la "soirée vache", j’étais encore avec Loulou quand Rya m'envoie un IM. Elle était en train de regarder un concert en direct. Je n’avais pas encore eu la chance de vivre cette expérience et j'en rêvais. Et comme souvent dans ce monde, nos rêves se réalisent.
Loulou est ok pour le concert. Nous nous téléportons.
Dans la salle, un type dont j'ai malheureusement oublié le nom, jouait tout seul à la guitare, en direct.


Loulou: On est vraiment en train de regarder un concert?
Moi, toujours blasé : Oui.
Loulou: C'est fou!

Loulou avait raison. C'était vraiment fou. Assister à un concert dans un lieu virtuel a quelque chose de fascinant. Comme si certaines sensations étaient amplifiées. Il y a d'abord toutes les sensations d'un concert "normal". La magie du direct. La fragilité. Le risque. La complicité qui s'établit entre celui qui joue et ceux qui reçoivent la musique. Même dans le virtuel cela reste un moment "unique". Comme dans les concerts normaux, il y a aussi la présence des autres et le sentiment de communion qui va avec. Le chat, les applaudissements, les différents looks croisés, les quelques mots que certains lancent... oui, les autres sont bel et bien "présents".
Là-dessus vient se greffer une des spécificités du virtuel: L'abolition de l'espace et des frontières physiques. A l'endroit où je vis, je peux écouter en direct dans un lieu "immatériel" une musique qui vient de n'importe quel endroit du monde et la partager avec d'autres personnes, qui sont elles aussi dans différents endroits du monde. Aucune frontière physique ne vient empêcher cette réception merveilleuse et ce partage. Un vrai sentiment de liberté. Et puis cette sensation de dédoublement: nous sommes chacun chez nous et pourtant ailleurs, dans un même lieu. Une expérience délirante et absolument géniale.

J'avais entamé une discussion avec Rya, grande consommatrice de concerts sur SL. Elle me donnait les noms des personnes les plus connues et qu'elle appréciait sur SL: Cylindra Rutabaga, Frogg et Jaycatt, Maximillien Kleene ( un canadien) , Dan Numbers, Julian Vista, Charles Coleman, Bill et Lam: des noms exotiques, inconnus pour moi mais déjà connus de toute une population sur Second Life.


Loulou, toujours hallucinée. : T’as écouté ses paroles ?
Moi: Non. Je suis en train de discuter avec Rya.
Loulou : C'est fou. Il chante des trucs sur ses problèmes d’avatars. « je suis tombé amoureux d'une avatar... et elle est partie avec un autre...
Moi: Tu plaisantes? Il parle de ses problèmes d'avatar?

Enfin! Le "truc" est revenu à ce moment-là . Un vrai "flash". L'hallucination que j'attendais. Merci!

Il y a bien une problématique spécifique à la vie virtuelle. Et certains ont ressenti le besoin de l'exprimer en chansons. Le « vécu virtuel » a déjà son expression artistique. Cela m'a bouleversé. J’en parle direct à Rya qui me le confirme.

Rya: Oui, cela revient souvent. Ils parlent dans leurs chansons de ce qu'ils vivent ici.
Puis elle s’arrête net, écoutant la chanson du type.

Rya: Oh ! Celle-ci je l’adore, je pars à chaque fois !
Paf! Et moi, je suis "reparti" à ce moment-là aussi. Sur cette simple phrase.

En une fraction de seconde, j'ai ressenti l'impact du virtuel sur le réel. Un art qui a une autre saveur, une autre odeur de vie est déjà dans le coeur de certains. C'est très troublant et génial à la fois.

Pour m'achever dans le plaisir, et la joie de nouvelles sensations, il y a eu enfin ce mini événement. L'artiste qui était sur scène s'est mis à parler entre deux chansons. Il plaisantait de façon absolument décontractée et vraiment cool et avait un rire que je n'avais jamais entendu. Un rire qui vient des tripes. Son ton de voix, tout à fait spécifique, reflétait cet "entre-deux" dont j'ai déjà parlé. A travers ce qui passait de sa voix, on pouvait sentir que lui-même vivait une expérience à part, à la fois sérieuse et ludique, réelle et irréelle. Le plus étonnant c'est que j'ai retrouvé exactement ce même " rire” , ce ton si spécifique dans des concerts totalement différents. Cela m'a troublé.
D'abord chez la chanteuse du Virtual Live Band ( VLB). Ce groupe est particulier: Les quatre membres du groupe vivent dans quatre endroits du monde et jouent ensemble.

Un en Allemagne

En Californie

En Amérique du Nord

En France


Et puis chez un jeune prodige de piano classique, 22 ans, Gideon Kappler, qui nous a joué entre autres, du Schubert et du Chopin.

C'était impressionnant. Entre les titres, il nous parlait, lui aussi avec cette distance et cette décontraction absolument incroyable. Je m'en souviendrai toute ma vie.



Heureusement que les autres sont là. Pour redéclencher la machine. Pour relancer "le truc". La flamme. Sans eux, je n'aurai pas pû retrouver ce qui m'anime tant sur SL. Ce désir de découvrir, d'expérimenter, de créer.
Goethe disait que si l'on lui retirait tout ce que les autres lui ont apporté, il ne lui resterait que la peau et les os.
Je le crois volontiers.



Salles de concert
The Fa3rik
Crazy Shark
Nantucket

SL New England est un groupe anglophone très actif basé dans la région deNantucket et qui organise entre autres des concerts. Avis aux amateurs...

Paroles : Don't worry be happy




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samedi 9 juin 2007

Second Life: " Swing Quest"1

Après notre première vraie rencontre sur SL, Loulou a continué sa Swing Quest (Quête de balançoires). Elle m’a envoyé ces quelques photos.



Pas mal non? Autant le dire tout de suite: je suis arrivé à un stade de ma vie virtuelle où voir des photos d’une avatar sur une balançoire me procure une véritable émotion. Je suis très atteint. Et le plus étonnant c'est que je ne m'en lasse pas.

Je ne suis pas particulièrement fétichiste. Et je n'ai pas de rapport particulièrement complexe avec les balançoires. Alors?


En voyant Loulou" triper" sur quelque chose d'aussi poétique et inutile, je me remets instantanément à plonger dans un état d'excitation et de plaisir de vivre. Cela me parle au fond de moi, très loin, près de la région du coeur et me procure cette sensation fondamentale devenue malheureusement taboue dans certains pays civilisés: de la joie.

Voir Loulou sur des balançoires me remet littéralement "dedans". J'entre alors dans un état de conscience particulier, entre le rêve et la réalité, quelque chose d'assez doux et excitant en même temps. C'est très agréable. On se sent plus vivant que jamais. Une sorte de piqûre de rappel. Il suffit d'un rien pour plonger. Une réflexion anodine, un geste, la découverte d'un lieu ou une banale photo d'une avatar en 3D. Ces petits riens ont un puissant pouvoir: ils sont chargés de sens. Un sens que peuvent comprendre ceux qui partagent comme moi cette expérience. Ou bien même ceux, les plus curieux, qui n'ont ni l'envie, ni le courage de venir sur SL mais qui vivent cette vie par procuration. Il n'y a pas de mal à cela. Chacun son degré d'implication.

Le fait que les autres avatars partagent leur vécu et leur expérience avec moi, renforce ma sensibilité et ma réflexion. C'est une richesse. Chacun apporte sa pierre à l'édifice. Mêmes ceux qui critiquent ce monde nous aident à le comprendre. Il est important de les écouter aussi. De même qu'il est essentiel pour nous aussi, de conserver notre esprit critique et notre humour. De chercher les vérités cachées de ce monde. Ses travers, ses bienfaits. C'est ainsi qu'on l'améliorera.

Il sera désormais difficile de voir des balançoires sur SL sans penser à Loulou. Cela est inscrit dans le livre de ma vie virtuelle.



Toutes les photos sont de Loulou Poplin.
Les adresses des balançoires sont pour le moment "confidentielles".


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